Intervention de Dominique Combarnous Espace Ethique Rhône Alpes

Espace éthique Rhône Alpes a invité le 7 novembre, Dominique combarnous pour une table ronde sur "l’éthique en management".

4 Si la gestion et l’administration de toute organisation de soins sont une nécessité, la contrainte de la performance et de l’efficience a éloigné les cadres de proximité de la mission de soins. Les normes, les impératifs économiques, les protocoles en tout genre laisse peu de place à la créativité et au pouvoir agir.

Cet état de fait, interroge sur le positionnement, sur la problématique des missions, rôle et de la place des cadres dit de proximité qui doit reposer sur une logique soignante (et les cadres supérieurs de santé qui sont susceptibles d’embrasser une fonction plus large avec une logique de soins centrée sur la stratégie et la gestion) bien que cette proximité soit souvent empêchée, les cadres de santé sont toutefois toujours motivés et engagés.

Responsabilité : Les cadres de santé doivent s’interroger sur leur positionnement en tant que leader et sur les valeurs qu’ils véhiculent et partagent avec les équipes. Ce sont des êtres humains sensibles à l’humanité de l’autre au service de l’humain ; L’empathie est un des qualités essentielles pour contrebalancer les relations de pouvoir. Ainsi on peut souligner la place centrale des cadres pour faire vivre l’éthique organisationnelle dans une institution.

4Le cadre empêché et tiraillé

Comme dirait P. Svandra, le cadre ne travaille pas « il ferraille ». Tous les jours, il bidouille pour que tous soient satisfaits, les patients, les familles, les professionnels et les supérieurs hiérarchiques. Ce métier est un des plus difficile de l’institution hospitalière et relève de l’équilibriste.

Les dilemmes éthiques sont de plusieurs ordres :

• Tension de rôle dues à la position d’interface entre la direction et les équipes. Dilemme entre le devoir de loyauté envers l’institution et la compréhension de la réaction de l’équipe vis-à-vis d’une décision, difficile d’être convainquant quand on n’est pas d’accord avec ladite décision ! Le cadre est alors le vecteur de la prise de décision mais peut être également un traducteur faut-il encore qu’il connaisse la stratégie et les objectifs.

• Management des équipes et tensions liés au déséquilibre entre vie privée et vie professionnelle : les injonctions contradictoires comme : « ne pas faire revenir sur repos les agents mais assurer la continuité des soins sans moyens supplémentaires », les temps partiels non respectés autant de circonstances qui sont difficiles pour les cadres. Un autre exemple, quand le cadre a un périmètre tellement grand (plusieurs services) qu’il n’a pas le temps d’écouter les équipes cela lui donne un sentiment d’avoir bâcler son travail et de ne pas respecter les patients et les professionnels.

• Prise en charge des patients non satisfaisante avec des effectifs pas corrects pour faire un travail qui requière davantage de monde qui font que le cadre a un sentiment de perte de sens et que les valeurs personnelles sont remises en cause, celles-ci étant le reflet de notre rapport à l’éthique. Opposition entre les valeurs et le sens attribué à l’action et les modes opératoires associés à la gestion de la performance.

4Éthique managériale, une solution ?

Éthique managériale du cadre de santé s’inscrit dans l’Éthique organisationnel de l’institution et de ses valeurs affichées pas toujours connues des professionnels ce qui contribue à la perte de sens. Il porte sur l’agir du manager vis-à-vis des encadrés. On a vu que le cadre de proximité est un manager de soins …or sous la pression institutionnelle et des attentes de rationalisation, il est devenu un gestionnaire ! donc, Des missions managériales qui s’effectue dans la complexité entre les différentes contraintes d’exigences de la gouvernance hospitalière et soutenir les professionnels pour maintenir la qualité et sécurité de soins ainsi que rassembler les éthiques individuelles pour les transformer en collectives et les coordonner.

Considérer l’humain professionnel comme une personne et non un sujet de production revient à considérer la personne dans son ensemble et lui donner l’autonomie et la responsabilisation nécessaire pour son épanouissement.

Pouvoir fournir des repères aux professionnels pour la sécurité de soins sous entends que les cadres soient informés des objectifs et participent un tant soit peu aux décisions et aient des missions claires.

Nécessité d’échanges et de manager avec le corps médical en ce qui concerne la prise en charge des patients avec la mise en place d’espace de réflexion éthique

Un climat éthique institutionnel pour une éthique managériale

Les décisions sont alors prises à l’aulne des valeurs prônées par l’établissement et ont un impact sur le comportement des personnes. S’il y a de la bienveillance institutionnelle découlant de ce climat éthique, le cadre de santé est conforté dans le fait de développer un mode de management basé sur l’écoute et l’attention aux professionnels en toute transparence avec sa hiérarchie. Un management participatif basé l’humanisation des pratiques professionnelles.

4Pour conclure

Les cadres de santé ont compris depuis longtemps que le management éthique consiste à considérer l’humain dans un agir juste pour les professionnels et les patients. Pour autant, ils sont confrontés au quotidien a un nombre important de dilemmes qui font qu’ils sont souvent empêchés. Le mode de gouvernance de nos institutions impacte sur les cadres de santé et les professionnels qu’ils encadrent. Les cadres de santé sont rarement associés et informés des décisions. Ils bricolent pour maintenir un équilibre entre leurs valeurs, l’application des directives et leur devoir de loyauté.

Ceci explique l’insatisfaction au travail, la perte de sens et la difficulté à trouver leur place. Pourtant des textes importants ont été publié depuis le rapport du professeur O.Claris, notamment « mieux manager, pour mieux soigner » qui s’il était suivi serait une vraie avancée pour l’hôpital et les professionnels. Comme l’écrit Michel Dupuis : « Tout le sens d’un management qui est appelé à devenir le management du sens et par le sens. » Ainsi Cédric Arcos et al écrivaient « seule la rencontre entre l’éthique et le management permet de porter sur les contradictions et les conflits un regard qui ne perde pas le sens du l’humain »